Neutraliser les règles des
contrats de travail pour mieux faciliter les licenciements, c’est, semble-t-il, le seul objectif du patronat dans les négociations interprofessionnelles sur la «modernisation» du marché du
travail. Vendredi, lors de la deuxième séance de discussions avec les syndicats, le MEDEF a clairement affiché la couleur dans une «note de problématique» contenant ses propositions pour
«répondre aux besoins des entreprises et limiter le sentiment de précarité des salariés (sic)». Autant de mesures pour désintégrer le contrat à durée indéterminée (CDI) auxquelles les syndicats
n’ont pas l’intention de donner suite.
Dans cette note, le patronat propose la «création d'une période d'essai cohérente» sur le plan national et interprofessionnel et «d'une durée suffisante» pour permettre à «l'employeur d'évaluer
les compétences et le comportement du salarié». Fixée aujourd’hui au niveau des branches, la période d’essai varie de trois à six mois, selon les secteurs d’activité. Le patronat voudrait donc
aller au-delà. Mais, pour Stéphane Lardy (FO), il est hors de question d’accepter de «négocier sur le plan interprofessionnel un quelconque allongement de la période d’essai».
La deuxième mesure consiste en «la mise en place d'un CDI conclu pour la réalisation d'un objet précis». Dès sa conclusion, ce contrat prévoirait «une clause d’expiration» correspondant à la
«réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu». Une fois remercié, le salarié «pourrait bénéficier des indemnités de chômage dans les mêmes conditions qu'à l'occasion d'un licenciement
classique (y compris des mesures d'accompagnement)». On retrouve ici le «contrat de mission» ou «contrat de projet» suggéré en 2004 par le rapport Virville remis au ministre des Affaires sociales
de l’époque, François Fillon. Selon ce rapport, ce contrat d'une durée maximale de cinq ans pourrait faciliter l’embauche d’un cadre ou d’un expert «pour participer à la mise en œuvre d'un projet
déterminé» à «l'issue d'une période d'essai significative». Les «contrats de mission» existent déjà, notamment dans la métallurgie et selon Alain Lecanu (CGC), «il n’y a qu’une dizaine de
contrats signés!». Autrement dit «ça ne marche pas!», a déclaré Stéphane Lardy (FO). Comme en 2004, pas un syndicat n’est prêt à souscrire cette proposition réchauffée du patronat.
Au côté de son projet de contrat à «objet précis», le MEDEF propose également d’aménager le CDI afin d’apporter «conjointement les sécurités nécessaires au salarié et les souplesses dont
l'entreprise a besoin». En plus d’une période d’essai plus longue, il souhaite instituer «une étape de validation économique répondant à l'incertitude des entreprises» afin d’autoriser «la
poursuite des relations contractuelles suivant les règles de droit commun». Le patronat réactive là sa vieille revendication de pouvoir licencier suivant le motif de «sauvegarde de la
compétitivité de l'entreprise»
Mais, comme l’a fait remarquer Gabrielle Simon (CFTC), l'évaluation de l'«incertitude économique relève de la compétence du chef d'entreprise», il n’y a aucune raison de la faire «assumer» au
salarié. «Nous contestons fortement la prise de position des organisations patronales» qui laisse croire qu’«en allégeant les procédures de licenciement, on va faciliter l'embauche», a résumé
Maryse Dumas (CGT). Avec cette procédure de consolidation du CDI en trois étapes – période d'essai, validation économique, embauche définitive – le patronat semble surtout vouloir ressusciter à
sa manière le contrat «nouvelle embauche» (CNE), avant qu’il ne disparaisse définitivement sous les coups des décisions judiciaires.
De leur côté, les syndicats ont demandé justement au MEDEF d'accepter l'abrogation du CNE. Et par la voix de FO, ils ont réclamé également, l'instauration d'un «bonus-malus» sur les allègements
de cotisations sociales consentis aux entreprises, en fonction de leur pratique plus ou moins vertueuse vis-à-vis de la précarité pour mettre fin aux abus de contrats à durée déterminée (CDD).
Selon les syndicats, le patronat a exclu d'en discuter vendredi. On le voit les conditions nécessaires à un compromis sont loin d’être réunies, surtout si le MEDEF s’en tient à sa «note (de)
problématique». Prochaine réunion le 21 septembre.
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