Cette section ouvre –entre autres droits– pour le syndicat la possibilité de s’exprimer et d’informer les salariés de l’entreprise. C’est actuellement au sein de l’article L.412-8 du Code du travail que se logent les dispositions garantissant ce droit de communication, celui-là même qui autorise la pose d’affiches ou la dif-fusion de tracts. Mais cet article, résolument ancien, n’était plus en mesure de répondre à la question de plus en plus prégnante de la diffusion des publications syndicales au moyen des nouvelles technologies de l’information. C’est pourquoi, par la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 sur le dialogue social, le législateur est venu préciser et surtout encadrer, le droit pour la section syndicale de faire usage, dans l’entreprise, de ces nouvelles possibilités.
Mais la toile, dans sa diversité, offre de très nombreuses possibilités que la loi elle-même ne pouvait prévoir. Diversité dont les juges, saisis de la question, ont eu à répondre et qui offre de nouvelles perspectives à l’exercice du droit syndical par le biais des nouvelles technologies. La cour d’appel de Paris, par un arrêt Secodip du 15 juin 2006 (InFOjuridiques, n°54, juin 2006, p.45), est en effet venue confirmer la dichotomie existant entre les modalités d’expression électronique des syndicats. Deux possibilités sont donc ouvertes:
- La première, en utilisant les moyens internes à l’entreprise, soumise aux règles prescrites par l’article L.412-8 du Code du travail et qui autorise le syndicat, à condition qu’un accord d’entreprise le prévoit, à diffuser ses tracts et publications soit par la messagerie électronique de l’entreprise, soit en créant un site sur l’intranet de l’entreprise. Obtenir l’accord de l’employeur est ici inévitable et les conditions de la diffusion devront être négociées. Le contenu reste quant à lui en principe libre, sous réserve, du respect des dispositions sur la presse et d’un usage strictement syndical des communications. Attention toutefois, l’utilisation de ces voies de communication ne doit pas dégénérer en abus –spam, gêne dans l’accomplissement du travail–, abus que le chef d’entreprise sera en droit de faire cesser et de réprimer par le biais, par exemple, d’une demande de fermeture du site (temporaire ou définitive) et/ou de sanctions disciplinaires contre le salarié ou les salariés concernés. Il est à noter que l’employeur, lorsque la section utilise les moyens de diffusion autorisés par l’accord, n’a pas le droit de retirer lui-même les communications électroniques, mais devra à cet effet saisir le juge des référés (InFOjuridiques, n°53, avril 2006, p.8). Mais si la section utilise des moyens de diffusion non autorisés par l’accord, à l’instar d’affiches ou de tracts disposés hors des panneaux syndicaux, l’employeur pourra les retirer sans recourir à un juge et sans commettre un délit d’entrave.
- La seconde, et c’est l’objet de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 15 juin 2006, en faisant usage de moyens indépendants de l’entreprise et qui échappent aux dispositions de l’article L.412-8 du Code du travail. Le syndicat s’est donc vu reconnaître le droit, comme tout citoyen, de créer un site internet, et ce, sans aucune restriction de la part de l’employeur (pas d’autorisation ou de négociation préalable), sans même être tenu de respecter l’obligation de confidentialité qui lie les membres du comité d’entreprise. Il pourra aussi envoyer depuis ce site des mails à l’adresse électronique privée des salariés. Le site pourra aborder de nombreux sujets et dépasser le cadre strictement syndical, mais devra tout de même respecter la loi de 1881 relative à la presse (diffamation, injure) et la loi sur la confiance dans l’économie numérique de 2004. Il faut aussi noter que si une information confidentielle est divulguée sur le site, le syndicat qui la publie est à l’abri, mais elle fera tout de même encourir un risque aux membres du comité d’entreprise qui l’auront dévoilée.
La section aura donc la possibilité d’opter pour un moyen de communication plus accessible aux salariés et donc plus écouté mais plus encadré ou (et!) pour un espace de liberté plus étendu, mais dont l’audience risque d’être moindre, sauf à en faire la publicité.
DROIT SYNDICAL : CHRONIQUE JURIDIQUE DU SAMEDI 20 OCTOBRE 2007
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