Force Ouvrière de Côte d'Or

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« FO A TOUJOURS PLACÉ LA NÉGOCIATION AU CENTRE DE SON ACTION » 191107

Publié le 19 Novembre 2007 par UDFO21 in AFOC 21

Interview de Jean-Claude Mailly parue le lundi 19 novembre dans La Tribune
 
 

Propos recueillis par José-Luis Duran, président du groupe Carrefour, dans le cadre d’un numéro exceptionnel du quotidien La Tribune élaboré par les dirigeants des entreprises du CAC 40.

Contrairement à ce qui se passe dans la plupart des pays d'Europe, on arrive souvent assez vite en France à la grève. Quels sont selon vous les remèdes à cette situation?
Il ne faut pas généraliser la situation, surtout au moment où une grève très dure des conducteurs de trains a lieu en Allemagne, après une grève importante des 130.000 postiers britanniques. La conflictualité en France n'est pas plus grande que dans d'autres pays et les chiffres montrent qu'elle a plutôt tendance à baisser. Force ouvrière a toujours placé la négociation au centre de son action, ce qui n'exclut pas la recherche du rapport de force quand nos revendications ne sont pas prises en considération. Nous n'avons d'ailleurs pas été opposés à la loi sur le dialogue social dans la mesure où elle pouvait améliorer les possibilités de concertation préalable à la mise en oeuvre d'un texte sur le social. Mais il faut bien faire le constat que, trop souvent, la négociation annuelle obligatoire est réduite à un simulacre du fait des employeurs. Au moment où la préoccupation numéro un des salariés est le pouvoir d'achat, c'est une attitude inacceptable.

La diversité sociale dans les différents pays de l'Union européenne vous paraît-elle un frein à une plus grande homogénéité des règles sociales?
  Je crois que chaque pays a son histoire et ses institutions. Ses institutions sociales sont héritées de ces histoires et de ces expériences différentes. Il n'y a pas d'obligation d'uniformité. Je fais le constat que les travailleurs français sont couverts (à 97 %) par une convention collective, qu'ils ont une bonne couverture sociale, des lois... La question de la diversité des législations sociales n'est pas le problème le plus difficile dès lors qu'on essaie de tirer les choses vers le haut.

Les députés examinent à partir de mercredi le projet de loi Chatel sur la consommation. Comment FO accueille-t-elle la réforme de la loi Galland?
La question est pour nous de savoir si cette réforme bénéficiera ou non aux consommateurs, qui sont majoritairement des salariés. Les relations entre les fournisseurs et les distributeurs ne sont pas univoques. Tout dépend de la taille des uns et des autres. Nous craignons toute politique de déflation qui jouerait contre l'emploi et les salaires. On a beau nous vanter les mérites de la concurrence, une concurrence chimiquement pure, ça n'existe nulle part. Une baisse des prix entraînerait une baisse des profits pour tout le secteur et nous ne voyons pas les grandes enseignes se livrer à ce genre de guerre de tranchées même si certains communiquent volontiers sur ce thème. Par ailleurs, les salariés sont toujours les perdants de ce genre de bataille, leurs salaires étant considérés comme un coût.

Quels sont, pour vous, les leviers à actionner pour améliorer le pouvoir d'achat des Français?
  Nous voulons naturellement améliorer le pouvoir d'achat des salariés. Pour nous, cela passe par une bonne négociation sur les salaires dans les branches professionnelles, y compris dans le commerce et la grande distribution. Nous ne sommes pas pour une politique des revenus qui inclurait le contrôle des prix comme un élément de pouvoir d'achat. Il y a eu ces derniers temps un renchérissement de nombreux produits alimentaires. Il faut peut-être que l'on reconsidère certaines données de la politique agricole. Comment comprendre que le prix du lait augmente par manque de production dans un pays comme le nôtre? En tout état de cause, le contrôle des prix n'a jamais permis de relancer l'économie. Je rappelle que la consommation intérieure est le moteur économique de notre pays.

La loi Chatel touche aux secteurs de la téléphonie mobile, des fournisseurs d'accès à Internet, des banques et de la grande distribution. Selon vous, ce projet va-t-il vraiment renforcer la concurrence entre les acteurs?
Il y a dans ce projet un certain nombre de dispositions qui vont dans le bon sens pour les consommateurs et qui reviennent sur les excès entraînés par la libéralisation du secteur des télécoms. Je rappelle que, dans les dossiers de surendettement des ménages, les factures liées aux portables, à Internet, tiennent une place importante. Donc, oui à la gratuité du temps d'attente sur les numéros verts, à l'interdiction des numéros surtaxés, en se demandant pourquoi cela a été possible. Oui au développement de la médiation bancaire sur les crédits d'épargne et de placement. Mais il faut aller plus loin. Notre association de consommateurs, l'Afoc, demande une lutte plus déterminée contre les clauses abusives dans les contrats, la possibilité de faire des actions de groupe et, d'une manière générale, de développer la prévention du surendettement qui devient progressivement un problème de société. Je constate que si l'endettement individuel des ménages n'est pas en France au niveau de certains pays comme la Grande-Bretagne ou les États-Unis, il progresse rapidement, ce qui nous inquiète.

Êtes-vous ouvert à une évolution de la réglementation sur l'ouverture des commerces le dimanche et dans quelles conditions?
Nous nous trouvons face à un dilemme permanent : "Je veux bien faire mes courses le dimanche mais je ne voudrais pas travailler le dimanche!" Soyons clairs : le travail le dimanche est un avantage comparatif pour les magasins qui le pratiquent... si les autres ne font pas de même ! On risque d'aboutir à la fermeture totale des petits commerces de centre-ville - et au chômage des salariés qui vont avec - et de généraliser l'ouverture le dimanche qui deviendrait un jour comme un autre. Dès lors, les enseignes n'auraient plus de raison particulière de maintenir les avantages financiers - plutôt maigres d'ailleurs - qu'elles consentent aux salariés. Il y une législation qui ouvre droit à suffisamment de dérogations pour faire face aux besoins commerciaux. Je ne crois pas qu'il faille aller au-delà, en prenant le risque d'un délitement des relations sociales et des modes de vie. Je voudrais indiquer que l'ouverture des magasins le dimanche est strictement interdite en Allemagne et que l'économie ne s'en porte pas plus mal pour autant.

Propos recueillis par José-Luis Duran, président du groupe Carrefour
 
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