Depuis la loi TEPA du 21 août 2007, les heures supplémentaires sont sous les feux de la rampe (FO Hebdo n°2819 du mercredi 10 octobre 2007).
Défiscalisation et exonérations se succèdent comme autant d’attraits pour le salarié et l’employeur. En pratique cependant, il arrive que l’employeur rechigne à reconnaître et à payer les heures supplémentaires. Le salarié peut alors faire valoir ses droits en justice. Mais attention, le régime de la preuve en la matière est particulier.
L’article L.212-1-1 du Code du travail dispose qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, «l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles». À la seule lecture du texte, employeur et salarié sont donc chacun mis à contribution dans la recherche de la preuve.
Par un arrêt du 10 mai 2007 (n°05-45.932), la Cour de cassation est venue, de nouveau, préciser le régime de la preuve des heures supplémentaires en interprétant cet article dans un sens plus favorable aux salariés. La recherche de la preuve implique désormais de suivre différentes étapes:
- Le salarié doit, dans un premier temps, fournir au juge des éléments de nature à appuyer sa demande. S’il ne le fait pas, le juge pourra le débouter (Cass. soc., 25 février 2004, n°01-45.441). Attention toutefois, et l’arrêt du 10 mai le rappelle bien, le salarié ne doit pas prouver qu’il a bien effectué ces heures, mais seulement apporter des éléments tendant à «étayer sa demande». Le juge ne peut donc rejeter la demande d’un salarié au prétexte qu’il n’apporte pas la preuve des heures qu’il a effectuées.
Par ailleurs, toutes les heures effectuées au-delà des 35 heures de travail hebdomadaire ne sont pas forcément des heures supplémentaires. Il faudra, d’une part, tenir compte des procédés d’aménagement du temps de travail (modulation, convention de forfait, travail par cycle, horaires individualisés,…) et, d’autre part, que ces heures soient ordonnées par l’employeur, même si ce n’est qu’implicitement (Cass. soc., 11 février 2003, n°01-41.289). Il conviendra donc de veiller, au risque là encore d’être débouté, à ce que les heures réclamées soient de réelles heures supplémentaires.
- Si cette exigence est remplie, le juge devra, dans un second temps, examiner les éléments produits par l’employeur. Si celui-ci ne fournit aucun élément, le juge devra accueillir la demande du salarié (Cass. soc., 11 juillet 2007, n°06-41.706). L’employeur ne peut se prévaloir du paiement des heures supplémentaires en invoquant par exemple, le versement d’une prime ou d’une quelconque contrepartie: une heure supplémentaire doit être payée en tant que telle (Cass. soc., 28 juin 2006, n°04-43089).
Après étude des éléments apportés par les deux parties, appuyés par d’éventuelles mesures d’instruction, le juge forme sa conviction et tranche le litige.
Salariés et employeurs ne sont donc pas à égalité dans la recherche de la preuve. Elle ne pèse, certes, formellement sur aucune des deux parties, mais le juge devra se montrer plus exigeant avec l’employeur, détenteur des documents de preuve dans l’entreprise.
Ce qu’il faut retenir:
Le salarié doit, lorsqu’il réclame devant le juge le paiement d’heures supplémentaires ou complémentaires –?pour les salariés à temps partiel?–, apporter, préalablement, des éléments visant à «étayer» sa demande. Ce sera ensuite à l’employeur de réfuter les allégations du salarié.
Il est donc vivement conseillé aux salariés victimes d’impayés et désireux de faire valoir leurs droits en justice, de conserver le plus d’éléments possible attestant de leurs horaires de travail (conservation de mails datés, feuilles de planning établies ou non par le salarié, description précise des tâches effectuées au-delà de la durée légale, attestations de salariés ou de tiers à l’entreprise…). Plus ces éléments seront tangibles et plus la demande sera crédible et susceptible de convaincre un juge.
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