Force Ouvrière de Côte d'Or

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LES FORÇATS DU STO - 090608

Publié le 9 Juin 2008 par UDFO21 in AFOC 21

LE SECTEUR JURIDIQUE DE L'UNION DEPARTEMENTALE FORCE OUVRIERE DE COTE D'OR COMMUNIQUE :



La Seconde Guerre mondiale

Les Prud’hommes de Draguignan ont condamné l’Allemagne à indemniser un travailleur déporté en Allemagne, sous le IIIe Reich dans le cadre du Service du travail obligatoire, soixante ans auparavant.


En juin 1942, Hitler a besoin de bras pour son industrie de guerre car tous les ouvriers allemands sont mobilisés dans l’armée. Berlin va donc déporter des millions de travailleurs forcés dans toute l’Europe, sauf en Grèce après des manifestations monstrueuses dans Athènes. Pour échapper au Service du travail obligatoire (STO), des milliers d’hommes vont rejoindre les maquis. Hitler demande donc à Pétain de lui livrer 350.000 ouvriers français, promettant de libérer un prisonnier de guerre pour trois travailleurs. C’est la fameuse «relève».

Parmi ces forçats, le jeune Varois Louis Rougé, aujourd’hui retraité à Brignoles, âgé de 86 ans, déporté de juin 1943 à mai 1945. En 1959 et 1964, la République Fédérale d’Allemagne a signé des traités prévoyant l’indemnisation des victimes étrangères du nazisme pour un montant équivalant à 510 millions d’euros. Louis Rougé demande donc à l’Allemagne vingt-trois mois de salaire à raison de quinze heures par jour. Et dans quelles conditions! Le travail est militarisé. Toute tentative de fuite se solde par l’envoi dans les camps de concentration et les ouvriers travaillent sous les bombes alliées.

La bataille juridique

Après une longue procédure, la Cour de cassation confirme, le 16 décembre 2003, que «l’immunité des États étrangers interdisait de condamner l’Allemagne à dédommager un Français contraint de travailler dans ce pays de juin 1944 à avril 1945 au titre du STO». C’est ce point de vue qu’a soutenu le parquet de Draguignan à l’audience du 18 mars 2004.

Mais le conseil de prud’hommes tient bon et, le 17 juin 2004, condamne l’État allemand à payer à Louis Rougé 276.224 euros de salaires et de dommages et intérêts en réparation du «préjudice moral incommensurable, ayant écarté la règle de prescription de cinq ans pour les créances de salaires».

En effet, le conseil de prud’hommes a estimé que l’Allemagne est le successeur juridique du Troisième Reich. Il s’est déclaré «compétent aussi bien dans ses attributions que territorialement pour juger ce dossier d’après le code du travail français». Il s’est aussi référé au nouveau code de procédure civile, au règlement du Conseil de l’Europe, au procès de Nuremberg, aux lois du gouvernement de Vichy et à une loi allemande de juillet 2000 «reconnaissant tardivement un droit à indemnisation pour les travailleurs forcés».

La Cour de cassation n’a pu que déclarer que «la décision du Conseil de prud’hommes est contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation». Régis de Gouttes, son premier avocat général, ajoute que «la Cour estime que le principe de l’immunité d’un État étranger s’apprécie au moment de l’assignation en justice et non au moment des faits». Mais les prud’hommes ont, eux, la mémoire longue.

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