Le texte instituant le passage en société anonyme de La Poste
- contesté par l'opposition
- arrive aujourd'hui au Sénat avant que l'Assemblée nationale ne prenne le relais dans quelques semaines.
Les discussions promettent d'être agitées, notamment sur le financement des missions de service public.
La bataille politique peut reprendre.
Près d'un mois après la « votation citoyenne » organisée par l'opposition et les syndicats, le projet de loi gouvernemental sur le changement de statut de La Poste revient sous les feux de l'actualité.
Les sénateurs vont en effet examiner à partir d'aujourd'hui et pendant quatre jours le texte de loi, avant que l'Assemblée nationale ne prenne le relais dans quelques semaines.
Le timing est serré - voire impossible - puisque l'actuel établissement public est censé devenir une société anonyme à partir du 1er janvier 2010.
Ce changement est le préalable à une augmentation de capital de 2,7 milliards d'euros prévue dans quelques mois, avec la Caisse des Dépôts (1,5 milliard) et l'Etat (1,2 milliard) en bailleurs de fonds.
Les sénateurs de l'opposition restent fortement mobilisés pour faire échouer ce processus, et la discussion devrait être agitée.
Revue des points clefs du débat qui s'ouvre.
La garantie d'un capital 100 % public.
Depuis le début, l'opposition dit ne pas croire à cette garantie, mise en avant par le gouvernement qui veut éviter le parallèle avec EDF ou France Télécom.
L'article 1 du projet de loi, qui instaure cette garantie, promet donc une grande joute oratoire et lexicale pour formaliser ce caractère 100 % public.
Le passage en commission des affaires économiques a donné un premier aperçu de la chose.
Le texte proposé initialement par le gouvernement expliquait que le capital de La Poste était détenu par « l'Etat ou par d'autres personnes morales appartenant au secteur public ».
Après le passage en commission, le « ou »est devenu « et » et la personne morale est de « droit public ».
Certains sénateurs veulent clairement expliciter que cette « personne morale de droit public » ne puisse être que la CDC.
Le financement du réseau de 17.000 points de contact.
La sanctuarisation de ces 17.000 points postaux - 10.850 bureaux de plein exercice, 4.400 agences postales communales en partenariat avec les mairies et 1.750 relais poste établis avec des commerces - est désormais dans le texte de loi.
Reste à savoir comment financer le surcoût induit par ce réseau extensif, estimé à 352 millions d'euros en 2008.
Jusqu'ici, il était très partiellement compensé par une exonération fiscale de 80 % sur la taxe professionnelle payée par La Poste, ce qui a permis de dégager 137 millions d'euros en 2008.
La commission des Affaires économiques a fait passer cette exonération à 100 % pour dégager 210 millions, mais le gouvernement est opposé à cette solution.
Jean-Paul Bailly, le président de La Poste, chiffre à 250 millions d'euros le surcoût à l'horizon 2011.
Le financement du service universel. A partir du 1er janvier 2011, la France va connaître son big-bang postal avec l'ouverture à la concurrence du dernier segment sous monopole, le courrier de moins de 50 grammes.
Dans ce nouveau paysage, La Poste conservera une mission de service universel postal, soit la distribution six jours sur sept en tout point du territoire. Cela a un coût, chiffré à 944 millions d'euros à l'automne dernier. Pour le financer, une taxe sur les nouveaux entrants va être instituée.
Au départ, celle-ci était basée sur le chiffre d'affaires de la concurrence.
Jean-Paul Bailly a indiqué qu'il était plus favorable à une taxe sur le volume d'activité des nouveaux entrants, puisque ceux-ci iraient probablement se spécialiser dans les services « low cost ».
La commission des Affaires économiques lui a pour l'instant donné raison. Incertitudes sur la retraite des agents.
C'est une conséquence passée jusqu'ici inaperçue du changement de statut : les 154.000 contractuels du groupe - soit 48 % des effectifs - pourraient voir leur régime de retraite complémentaire profondément modifié.
La Poste étant pour le moment un établissement public, ils relèvent jusqu'à présent d'un gestionnaire public spécifique, l'Ircantec.
Avec le passage en société anonyme, les contractuels pourraient potentiellement relever du régime complémentaire du privé, l'Agirc-Arrco, bien moins avantageux : les pensions seraient réduites de 5 % à 7,5 % selon les syndicats.
Conscient du problème, Christian Estrosi, le ministre de l'Industrie, a indiqué qu'il comptait déposer un amendement qui « garantira les droits des salariés de La Poste ».
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