«FREE N’EST PAS UN CLUB DE PHILANTHROPES» - 180512
17 mai 2012
Trois questions à Valérie Gervais, Secrétaire générale de l’AFOC

Valérie Gervais: Si on en croit l’engouement qui a suivi l’arrivée agressive du quatrième opérateur sur le marché de la téléphonie, on peut le penser. Dans la réalité, c’est plus compliqué. Les offres plus qu’alléchantes de Free font que, sur les factures, le consommateur s’y retrouve mais pour les services offerts c’est moins sûr. Nous gardons un goût amer de notre expérience avec cet opérateur sur le marché de l’Internet.
Free a encore tout à prouver dans le secteur de la téléphonie mobile et les pannes de réseaux constatées ces dernières semaines ne sont guère encourageantes. L’AFOC s’inquiète aussi de la dimension sociale de cette arrivée sur le marché et des pertes d’emplois qu’elle entraîne dans le secteur. À terme, cela ne sera pas sans conséquence, tant sur les services offerts aux consommateurs par les opérateurs que sur l’entretien et l’investissement dans de nouveaux réseaux.
FO Hebdo: Pour l’instant, Free offre des prix défiant toute concurrence et c’est alléchant...
Valérie Gervais: À première vue, le consommateur est pleinement gagnant. Le forfait à 19,99 euros (15,99 euros pour les abonnés Freebox) défie toute concurrence en effet, et le forfait à 2 euros (gratuit pour les abonnés Freebox) est mieux-disant que les offres «sociales» des autres opérateurs.
Néanmoins, il faut ajouter à ces tarifs le prix de l’acquisition du terminal et là, la facture peut être plus douloureuse. Si les forfaits de Free sont sans engagement, l’abonné devra payer son terminal au prix fort (jusqu’à 785 euros pour un Iphone 4) ou s’engager pendant vingt-quatre ou trente-six mois dans un crédit à la consommation, le terminal lui revenant alors plus cher. En plus, le modèle Free offre moins de services associés, a encore très peu de boutiques et un service après-vente pas toujours à la hauteur.
Free n’est pas un club de philanthropes et il n’est pas question pour l’AFOC de privilégier le low cost.
FO Hebdo: Avec l’arrivée de Free Mobile, les décideurs promettaient une «revitalisation» aux consommateurs du secteur; qu’en est-il avec le recul?
Valérie Gervais: L’arrivée de Free a surtout provoqué un chamboulement obligeant le secteur à se trouver un nouvel équilibre. En apparence, ce nouvel équilibre se fait au profit du consommateur (prix des forfaits à la baisse, avancées consuméristes obtenues en amont de l’arrivée de Free), mais en apparence seulement.
Quant au financement du terminal, on se trouve à la croisée de deux modèles économiques ayant chacun leurs avantages et leurs défauts et qui pourraient de facto cohabiter. Celui des opérateurs historiques offre une subvention au consommateur afin de lui permettre d’acquérir un terminal à moindre coût. En contrepartie, il doit respecter une période minimale d’engagement de douze ou vingt-quatre mois. Avec l’autre modèle, adopté par Free, le consommateur souscrit un forfait sans engagement, mais doit alors financer seul son terminal. Pour l’AFOC, il n’est pas question de privilégier un modèle par rapport à l’autre. Nous préférons que le consommateur ait le choix, en fonction de ses attentes et de ses besoins.
