Aujourd’hui, la
grande précarité n’épargne ni les jeunes, ni les étudiants, ni les retraités, ni les salariés qui ont un emploi et encore moins ceux qui sont exclus du marché du travail.
8,2 millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté,
c’est-à-dire près d’un Français sur sept.
En 2009, le taux de pauvreté en France s’établissait à 13,5% de la population, en hausse de 0,5 point par rapport en 2008, ce qui a signifié que 400.000 personnes de plus sont tombées dans la
trappe à pauvreté.
Ces chiffres accablants ne peuvent que frapper les consciences. Ils sont extraits d’une étude de l’INSEE publiée à la fin du mois d’août dernier et portent sur 2009, année qui a ressenti les
premiers effets de la crise de 2008.
Il est malheureusement fort à craindre que, sous les effets conjugués de la politique libérale, des contraintes des directives européennes, du chômage persistant, de la précarité des emplois,
de la multiplication du travail à temps partiel, du durcissement des conditions d’accès aux minima sociaux et à la retraite à taux plein, la situation actuelle soit encore plus dégradée et
qu’en deux ans, le sort des plus démunis se soit encore aggravé. Le pire pourrait être à venir.
Le seuil de pauvreté est une mesure statistique qui selon la définition en vigueur en Europe, correspond à un niveau de vie inférieur à 60% du revenu médian*. Il correspond, en 2009, à 954
euros mensuels. 8,2 millions de personnes vivent en dessous de ce seuil, dont la moitié avec moins de 773 euros par mois.
A titre de comparaison en 2011, le montant du revenu de solidarité active socle (RSA), pour une personne, s’élève en 2011 à 466,99 euros par mois. Pour un retraité, le montant maximum de
l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) au 1er avril 2011, soumis à condition de ressources, est de 742,27 euros par mois pour une personne seule.
La situation s’est fortement détériorée pour 40% des personnes les plus modestes. Alors qu’entre 2005 et 2008, elles avaient vu leur niveau de vie progresser de 2% par an, la tendance s’est
inversée entre 2008 et 2009.
En 2009 en effet, le niveau de vie des 10% des personnes les plus modestes s’avère inférieur à 867,5 euros par mois, en baisse de 1,1% par rapport à 2008.
Rappelons que dès 2005, le rapport du Comité national des retraités et personnes âgées (CNRPA) intitulé «L’érosion du pouvoir d’achat des retraités», réalisé sous l’impulsion des
représentants Force Ouvrière de la Commission ressources des retraités (Benoît Jayez, animateur de la Commission ; Hélène Ho Minh Triet, assistante confédérale) mettait l’accent sur
l’évolution du risque de pauvreté parmi les personnes âgées. (lire extrait ci–dessous)
LES INEGALITES SE CREUSENT
L’INSEE dresse le constat que les écarts entre les niveaux de vie se creusent. Le niveau de vie plancher des 10% des personnes les plus nanties est 3,4 fois plus élevé que le niveau de vie
plafond des 10% de personnes les plus modestes.
LES PRESTATIONS SOCIALES ONT JOUE UN ROLE CRUCIAL D’AMORTISSEUR
La part des prestations sociales dans les revenus des 10% des personnes les plus pauvres a augmenté, passant de 36,3% en 2008 à 39,3% en 2009. Des mesures ponctuelles ont permis d’atténuer
les effets de la crise sur les ménages modestes. Ces dispositions ont concouru à atténuer les effets de la crise sur les ménages modestes et à limiter l’augmentation du taux de pauvreté entre
2008 et 2009.
UN RETRAITE SUR DIX EST PAUVRE
La retraite n’est pas un paravent contre la pauvreté. En 2009, avant la réforme durcissant les conditions de liquidation de la retraite à taux plein, 9,9% des retraités vivent dans la
pauvreté, soit 1.308.000 personnes, c’est-à-dire un retraité sur dix.
LA PAUVRETE TOUCHE LES SALARIES, SEVIT PARMI LES CHOMEURS ET N’EPARGNE PAS LES JEUNES
Le travail ne met plus à l’abri de l’exclusion sociale. Il y a malheureusement 10,1% des actifs âgés d’au moins dix-huit ans, pauvres, soit 2.800.000 personnes.
Dans la catégorie des salariés, le taux de pauvreté est de 6,3%, soit près de 1,4 millions de personnes. Parmi les chômeurs, même si le taux de pauvreté des ceux-ci a diminué de 1,1 point par
rapport à 2008, on dénombre 34,7% de chômeurs vivant en dessous du seuil de pauvreté, c'est-à-dire 930.000 personnes. Chez les jeunes, un étudiant sur cinq a un niveau de vie inférieur au
seuil de pauvreté, soit 351.000 étudiants.
Derrière ces statistiques, il y a une réalité sociale : la dureté de la vie de ces millions d’hommes et femmes qui n’ont pas de revenus suffisants, qui vivent dans des conditions qui ne leur
permettent pas de se loger, de se soigner, de se chauffer, de se déplacer, de se nourrir... de façon correcte, qui sont contraints de faire des arbitrages budgétaires sur des dépenses de
première nécessité.
Il y a lieu de s’interroger sur l’impact des politiques de réduction des dépenses publiques, des budgets et services sociaux et de remises en cause des systèmes de protection sociale
collective que le gouvernement a engagées et qui menacent la cohésion sociale.
L’histoire sociale a hélas montré qu’à toutes les époques et dans toutes les sociétés, les inégalités sociales, la pauvreté, peuvent être sources d’actions violentes de désespoir. Dans un
pays aussi riche qu’est la France, les poches de pauvreté sont non seulement indécentes et inacceptables, mais sont surtout une atteinte aux valeurs républicaines.
*En 2009, le revenu annuel médian s’élève à 19.080 euros, soit 1.590 euros par mois.
Sources: INSEE Première, n°1365, août 2011
EXTRAIT DU RAPPORT DU COMITE NATIONAL DES RETRAITES ET PERSONNES AGEES (CNRPA) DE 2005
«L’érosion du pouvoir d’achat des retraités»: «La montée d’un «risque de pauvreté des retraités et personnes âgées» apparaît ainsi comme un fait social nouveau, lequel motive une inquiétude
collective permettant même de parler d’une réelle crainte d’une précarisation dans l’avenir de cette catégorie de population... Il ressort que si la pauvreté a légèrement diminué en France
entre 1996 et 2000, les retraités représentent une part croissante de la population pauvre. Ainsi, en 1996, 430.000 retraités disposaient d’un revenu mensuel inférieur au seuil de pauvreté
correspondant à la demi-médiane des niveaux de vie, contre 471.000 en 2000. Cette augmentation n’est pas uniquement due à l’accroissement global du nombre de retraités estimée à environ 4% au
sein de la population totale contre près de 10% dans la population pauvre. Elle résulte aussi de l’élévation du seuil de pauvreté au-dessus du minimum vieillesse pour une personne seule. Cela
a pour effet, le passage des retraités touchant le minimum vieillesse, dans la statistique de la pauvreté. De nombreux retraités dont les revenus évoluent lentement, car indexés sur les prix,
ont été rattrapés par le seuil à 60% de la médiane des niveaux de vie entre 1996 et 2000».
Le rapport du CNRPA susvisé dénonçait également l’insuffisance du minimum contributif, institué en 1983 lors du passage à la retraite à soixante ans, pour tous les salariés ayant cotisé une
carrière complète mais sur de faibles revenus et qui peuvent bénéficier d’une pension de vieillesse à taux plein. «En 1983, le minimum contributif représentait 60,40% du SMIC brut en vigueur,
alors que vingt ans après il ne représentait plus que 46%. Les nouvelles modalités d’attribution du minimum contributif (apportées par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites) et
fixées par décret à compter du 1er janvier 2004, ne répondent pas à l’attente du CNRPA. Les principales modifications ont consisté en une augmentation de la durée d’assurance prise en compte
pour le calcul du minimum contributif (qui passe ainsi de 150 à 160 trimestres d’ici 2008) ainsi qu’en l’institution d’une majoration du minimum au titre des périodes effectivement cotisées
par l’assuré (+ 3% au 1.01.2004, +3% au 1.01.2006, + 3% au 1.01.2008 en plus des revalorisations normales)».