Montargis (Loiret) – Gueugnon (Saône-et-Loire)

Au bord de la route, entre Montargis et Gueugnon, tous les spectateurs sont armés d’appareils numériques. Lorsqu’ils faisaient encore des photos argentiques, l’activité de l’usine Kodak de Châlon-sur-Saône était florissante.

 

Le site, qui fabriquait aussi des films et des bains pour le cinéma, la santé médicale et les arts graphiques, a embauché jusqu’à 3000 personnes. Mais la généralisation des images en format digital a condamné l’usine. Elle a fermé en 2005, supprimant 2000 emplois.

 

 

 

 

Quelques produits ont été cédés sur appel d’offres à des repreneurs. Ils sont venus s’installer sur l’ancien site. Le premier, arrivé en 2006, est Champion photochimie, une entreprise canadienne spécialisée dans la fabrication des bains. Il a signé un contrat de 3 ans extensible à 5 ans avec Kodak, qui lui fournit 95% de son activité.

 

 

 

«À l’époque, 107 salariés sont passés de Kodak à Champion, explique Antonio Batista, délégué syndical FO de Champion. Le transfert s’est fait à la baisse, on a dû négocier pour garantir le salaire et l’ancienneté.» Si la photo amateur s’est écroulée, le cinéma et les arts graphiques se portent bien. Mais la production est gérée par la filiale espagnole de Champion. C’est elle qui en trois ans a engrangé 2 millions d’euros de bénéfices nets. Kodak a pour sa part empoché 7 millions d’euros.

 

 

 

Le contrat de 3 ans terminé, Kodak a commencé à baisser ses tarifs et ses commandes. «On a eu 9 licenciements en 2008 et 19 en 2009, poursuit-il. L’idée de Kodak c’était de sous-traiter la production française à Champion pour que ça lui coûte moins cher. En parallèle, la production des usines Kodak de Russie, de Chine et d’Allemagne a augmenté.»

 

 

 

En 2010, le contrat n’a pas été renouvelé. Champion a été placé en redressement judiciaire en mai dernier. Les 80 salariés ont été licenciés fin juin, sans avoir jamais vu leur patron, volatilisé. Kodak aussi joue aux abonnés absents. «Ces derniers mois, on a mené plusieurs actions, on a fait un droit d’alerte, tout a été prémédité, dénonce le délégué syndical. Champion s’arrête après avoir engrangé ses bénéfices et Kodak peut récupérer son activité sans avoir eu à licencier. Au final, tout est pris en charge par AGF. Avec leurs magouilles, on finance nos propres licenciements.» Une autre entreprise, La Mesta, est dans la même situation.

 

 

 

Les salariés ont le soutien des élus locaux. Le président du Conseil général Arnaud Montebourg a demandé à l’Etat d’engager des poursuites judiciaires. Force Ouvrière et la CGT ont lancé une action aux prud’hommes. «Le contrat de cession est frauduleux, alors d’après le code du travail nous appartenons toujours à Kodak, on espère pouvoir faire annuler les licenciements», ajoute Antonio Batista. Les plaidoiries auront lieu le 16 décembre.

 

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