TRANSPORT FERROVIAIRE: LES CONTRÔLEURS POUSSÉS À LA RENTABILITÉ - 041212
04 déc. 2012
Sécurité
«Nous, on ne veut pas des
cadeaux mais des effectifs supplémentaires», explique Émile Lhomme, responsable national des trains à la Fédération FO Cheminots. Début novembre, la SNCF de la Région Centre a organisé un
«challenge antifraude» pour inciter les contrôleurs à dresser un maximum de procès-verbaux. Des lots étaient prévus pour les cinquante meilleurs agents: iPad, appareils photo numériques, consoles
de jeux...
Ce jeu-concours a indigné les syndicats et les associations d’usagers. Il accentue l’image répressive des contrôleurs –qui touchent déjà des primes en fonction de leur activité– au détriment de
la sécurité et de l’information. Il semble aussi remettre en cause leur professionnalisme.
À la demande de FO, le challenge a été supprimé. «La direction a changé l’affiche, mais elle maintient une opération avec les mêmes objectifs, poursuit Émile Lhomme. Les effectifs sont en baisse,
les contrôleurs sont de plus en plus seuls dans les trains, ils font ce qu’ils peuvent. Les passagers voient qu’il y a moins de contrôles et ils fraudent davantage, les recettes diminuent, mais
ce n’est pas la faute des agents.»
En Alsace aussi, la fraude risque d’augmenter. À partir de juillet 2013, la SNCF veut supprimer la présence systématique de contrôleurs sur les trois lignes régionales TER au départ de Mulhouse.
Une vingtaine de postes seront supprimés. Les contrôles se feront désormais de manière aléatoire par une brigade volante de plusieurs agents.
ÉCONOMIES DE BOUT DE CHANDELLE
«C’est une décision économique de la SNCF, pour
rentrer dans le budget de la Région Alsace avec qui elle passe une convention chaque année, explique Sylvain Xaé, cheminot FO Mulhouse. Et sa seule variable, c’est la masse salariale. Comme 95%
des usagers de ces lignes sont abonnés, la fraude est minimale.»
Mais un contrôleur ne fait pas que vérifier les titres de transport. Il assure aussi la sûreté des voyageurs, assiste les personnes à mobilité réduite, aide le conducteur en matière de
sécurité... Les agents volants se contenteront de cibler quelques trains, dans une logique uniquement répressive.
La disparition des contrôleurs est justifiée par la modernisation des rames concernées. «Depuis 1999, la SNCF équipe les lignes pour que le conducteur puisse rouler seul, explique Denis Jacob,
responsable régional à FO Cheminots. Il y a des caméras de surveillance des quais, des portes automatiques, un équipement radio. Tout le département sera équipé progressivement.»
Pour réclamer le maintien des agents à bord des TER, une intersyndicale, à laquelle FO appartient, fait signer une pétition aux voyageurs et envisage de faire grève. Les signatures seront remises aux
élus locaux et à la direction en décembre. «On pense avant tout à la sécurité des usagers, poursuit Denis Jacob. C’est compliqué d’être seul pour gérer les voyageurs, surtout quand ils partent
sur les voies, il risque d’y avoir des problèmes graves.»
Ce phénomène commence à se développer aussi dans d’autres régions. «Nous sommes contre, poursuit Émile Lhomme. Pour les contrôleurs ce n’est plus le même métier et ce sont des économies de bout
de chandelle car il y a plus de vandalisme et les gares et les rames sont abîmées.»