
Depuis, en France comme ailleurs, sous l’effet du capitalisme libéral triomphant, la flexibilité et la précarité se sont développées.
Arrive la crise systémique de 2007, que nous avons maintes fois analysée comme une crise du capitalisme, et la nécessité, pour en sortir, de pratiquer trois ruptures, aux niveaux international, européen et national. Ce qui n’est toujours pas le cas.
Pendant une première période, tout le monde se félicitait du fait que la France traversait mieux la crise que d’autres, notamment grâce au rôle d’amortisseurs des régimes sociaux et des services publics. Dès 2007, nous expliquions qu’il arriverait un moment où l’on nous dirait que pour sortir de la crise il serait nécessaire de remettre en cause ce que d’aucuns appellent notre «modèle social»! Nous y sommes.
Au niveau européen, le président de la Banque centrale européenne, le banquier Draghi, toujours prompt à aider les banques privées, a même déclaré que le modèle social européen était condamné!
On assiste d’ailleurs en Grèce, au Portugal, en Espagne, en Italie et au Royaume-Uni notamment à ce que l’on peut qualifier d’attaques en règle. Le mécanisme européen de stabilité et le traité dit de solidarité, de coopération et de gouvernance s’inscrivent dans cette logique.
À nouveau, pour protéger le capital et la rente, il faudrait rogner les droits sociaux. C’est notamment l’un des objectifs des «accords compétitivité-emploi» initiés par le gouvernement et repris par le patronat.
Après les ENCA viennent en quelque sorte les LICA: licenciements à contraintes allégées. Afin de ne plus être obligé de licencier pour motif économique les salariés qui refuseraient de voir baisser leur temps de travail et leur salaire, on inventerait un licenciement spécifique, «sui generis», c’est-à-dire une forme de licenciement «économique» lowcost. Ce qui permettrait aux employeurs d’échapper à toute une série d’obligations liées au licenciement économique, telles que le reclassement ou le contrat de sécurisation professionnelle.
Quand il s’agit de remettre en cause les droits sociaux, le patronat réclame des lois nouvelles. Quand il s’agit d’apporter de nouveaux droits aux salariés, il peste contre le législateur.
Et pourtant, comme l’écrivait Montesquieu: «les lois inutiles affaiblissent les lois nécessaires».
Certains syndicats se montrent ouverts à la négociation sur cette question, pas Force Ouvrière. Il est vrai que nous ne sommes pas – indépendance et liberté obligent – de tendance cogestionnaire des entreprises.
La course à l’échalote sur le plan européen en matière de dumping social et fiscal doit cesser.
Un petit coin de ciel bleu: à la suite de nos interventions (dont celle du 18 janvier au «sommet social»), le ministre du Travail vient d’indiquer qu’il refusait les propositions de la Commission européenne sur le détachement des travailleurs, qui soumettraient le droit de grève au respect des principes de libre prestation de services et de liberté d’établissement.
Il aurait été cependant plus cohérent que, précisément, son collègue des transports ne remette pas en cause le droit de grève!
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